Découvrez une fête au Togo : L’ Aïd El Kebir , la Tabaski à Kolowaré

Le 21 aout nous avons fêté la Tabaski, la grande fête musulmane où on offre des victimes au Tout-Puissant, pour demander pardon des péchés, implorer sa miséricorde et son assistance.

Tabaski : une tradition musulmane

Dans la tradition musulmane, cette fête commémore le sacrifice du fils d’Abraham, Ismaël, remplacé par un Bélier par l’ange Gabriel. Abraham est celui qui adore Dieu sans compromis. Sa foi entraîne une soumission, et une obéissance modèle pour tout musulman (Coran 6,74). Avec la célébration de l’Aïd El Kebir les Musulmans s’unissent aux pèlerins de la Mecque qui, en ce jour, achèvent le pèlerinage.

La prière

Vers 8 h.30, je quitte la mission et je descends au village. J’arrive au terrain de foot, où habituellement a lieu la grande prière. Mais je ne trouve personne, sauf des enfants qui s’amusent avec des chèvres et des moutons Je croise le vieux Boukari qui me fait signe avec son bras en disant : « La prière est à la Mosquée ».
Je passe au milieu du village, j’entre dans les concessions, je salue et je bavarde avec les gens. Une maman est en train de faire la toilet
te à deux de ses enfants.

J’arrive à la grande place du village, devant la Mosquée principale, et je suis entouré d’une nuée d’enfants. Tous veulent une photo. Je ne peux pas refuser. C’est leur fête !
Les gens sont en train d’entrer dans la mosquée. Aux trois entrées les fidèles laissent les chaussures devant les portes.

Le repas

Je me promène et j’arrive au fond du village, au bout du marché. Je suis étonné du nombre de bœufs que je vois : une douzaine. Les autres années j’en voyais deux, trois, quatre. Certains sont liés à un arbre, d’autres couchés à terre. De temps en temps un mouton, ou un bélier. Je passe dans les cours pour saluer les gens. Ils sont tous attelés à piler l’igname bouillie pour préparer le repas de fête : les petits pains de fufu qui seront consommés avec la sauce et la viande des victimes immolées.

J’arrive dans la cour d’Afo Goma, l’ami forgeron de Sokodé. Je demande où se trouve son bœuf. « Viens avec moi, me dit Gamal, et tu le verras ». Il m’accompagne au centre du village, dans la maison de Larey», mon collaborateur, traducteur, enseignant de Kotokoli. Et je vois l’animal couché à terre, prêt à être immolé. Ils font partie de la même famille, et ils offrent la même victime. Peu loin une autre victime. « Ce bœuf est à moi, c’est mon offrande aux ancêtres, fais-moi une photo, ici à côté du bœuf », me dit Sahid. J’obéis.

Les offrandes

La prière est à peine commencée. A l’intérieur de la Mosquée les hommes, au fond les femmes, mais une bonne partie d’elles sont dehors, accroupies, tout autour.
Je m’approche et je vois que l’Imam principal Hawal est en train d’entrer. A côté l’ami Afo Goma. Je mets dans ses mains mon offrande pour la fête et une prière pour les amis et conteurs
défunts.
Je vois Issouf qui s’approche et il m’invite à aller avec lui : « Viens saluer El Hadji Salif, tu le connais ». Je le suis et je vois un vieux aveugle assis sur une natte, sous un petit auvent, pas loin de la Mosquée. Il est aveugle, mais son visage est plein de lumière et de paix. C’est le mari d’Mamatou Wuro Kora, la grande griotte, décédée il y a quelques années. Elle faisait partie du groupe des conteurs. Avec ses récits chantés et modulés elle arrachait les larmes.

Une autre rencontre imprévue

Habillé d’une tunique blanche, je vois mon ancien coiffeur Abdul Abiru, parti a Kpalimé pour des études d’Islamologie. On s’embrasse très fort, on s’échange les nouvelles. Il est venu pour la fête, mais il n’a pas encore terminé ses études Je lui glisse quelques mots du vieux sage Tierno Bokar, l’oncle d’Amadou Hampaté Bah: « Rappelle-toi que Dieu est unique et il est libre de se manifester comme il veut, essaye de respecter toutes les croyances, ne sème jamais de la haine avec ta parole. Sache que Dieu est miséricordieux et que l’amplitude de sa miséricorde est plus vaste de celle de nos péchés ».
A la fin de la prière j’accompagne l’Imam et ses notables dans sa cour.

Les sacrifices

C’est lui qui doit commencer, le premier, les sacrifices. La victime est là prête à être immolée. Le museau ligoté. On éloigne les enfants, ensuite avec un coup net le sacrificateur lui coupe la jugulaire et, peu à peu, lui ouvre le cou. Le flux de sang coule dans la fossette en bas. Tout autour un tas de gens, qui sont étroitement associés au rituel. Certains s’approchent et trempent les doigts dans le sang, ensuite se touchent le front. D’autres recueillent le sang dans un bol.

Des jeunes demandent à faire une photo avec moi, pour un souvenir et témoigner de ma présence à la fête. Sur la place à côté a lieu un autre sacrifice. Je m’arrête un moment, encore quelques photos, ensuite Bassarou me ramène en voiture à la mission. Il me dit : « Nous ne sommes pas allés au terrain de foot pour la prière, parce que la place n’avait pas été nettoyée, malgré l’invitation du chef ».

A 16 h, Afo Mahomed, le frère d’Afo Goma l’ami ferrailleur de Sokodé, arrive à la mission avec une portion de la victime immolée. « J’ai compté 13 bœufs, me dit, mais sans doute il y en avait d’autres à l’intérieur du village. Tu sais les gens préfèrent se mettre ensemble pour acheter un bœuf, les béliers et les moutons coutent trop chers, pour un mouton tu peux payer 120 mille francs. A Sokodé on a vendu un bélier à 600 mille francs, tandis qu’avec 150 mille francs tu peux acheter un bœuf. Mais ceux qui ont les moyens préfèrent offrir un mouton ».

 

P. Silvano Galli
Paroisse St Léon IX – Kolowaré

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